La géographie de l'Acadie

Le territoire


À l’instar d’Anita Leduc, héroïne du roman de Christiane St-Pierre, Absente pour la journée, prenons une carte du monde : de l’Acadie, nulle trace…

Et pourtant, nous enseigne le dictionnaire français, “l’Acadie démarre son histoire dans la province Maritime de Nouvelle-Écosse, au Canada”. Qu’est-ce à dire ?

Heureusement, l’auteur du Dictionnaire du français acadien, Yves Cormier nous explique dans son guide L’Acadie d’aujourd’hui, que l’Acadie c’est : « Un territoire où la mer est toujours disponible au regard... L’eau est omniprésente : elle côtoie chacune des trois provinces Maritimes, soit : 
– le Nouveau-Brunswick,
– la Nouvelle-Écosse,
– l’Île-du-Prince-Édouard. »

Voici donc l’Acadie définie. Pourtant ce n’est pas si simple. Dans L’Acadie de l’Atlantique, la SNA (Société Nationale de l’Acadie) y ajoute Terre-Neuve, en précisant : « Sans territoire juridique, sans même un nom pour la situer précisément, l’Acadie est avant tout affaire d’identité. [...] Indéfinissable, l’Acadie, sorte de pays virtuel, est en même temps solidement ancrée dans la profondeur de l’expérience commune. » 




Les habitants


Aujourd’hui, pour désigner le foyer de l’Acadie contemporaine on se réfère communément au Nouveau-Brunswick (N.B.), à la Nouvelle-Ecosse (N.E.) et à l’Ile-du-Prince-Edouard (I.P.E.), connus sous le terme de provinces Maritimes. Il existe aussi une petite communauté acadienne à Terre-Neuve dont les efforts de reconnaissance ont donné lieu à l’expression l’Acadie de l’Atlantique.
Différentes perceptions coexistent cependant. Une de ces perceptions, proposée par le géographe acadien Adrien Bérubé, suppose l’existence d’une Acadie généalogique constituée des régions qui ont accueilli les familles acadiennes au moment de la Déportation. Cette Acadie généalogique, que certains appellent l’Acadie de la diaspora, est composée de plusieurs régions au Québec, aux U.S.A. : Maine, Vermont, Louisiane et au centre-ouest de la France.
Toutefois l’aire géographique de l’Acadie contemporaine  correspond essentiellement aux régions acadiennes des provinces de l’Atlantique. Le N.B. possède la plus forte concentration d’Acadiens.
Selon les chiffres de Statistique Canada, recensement de 2011, la population francophone, selon la langue maternelle était de :

- au N.B. : 31,6 %  (233 530 individus sur un total de 739 900)
- en N.E. :  3,4 %  (31 110 individus sur un total de 910 615)
- à l’I.P.E.:  3,8 %  (5195 individus sur un total de 138 435)
- à Terre-Neuve : 0,5 % (2480 individus sur un total de 509 950)

Le parler acadien

Les variations du français acadien.

Comme dans toutes les cultures, la langue est intimement liée à la question identitaire en Acadie. Petit îlot francophone dans une mer anglophone qu’est l’Amérique du Nord, l’Acadie de l’Atlantique associe la langue française à un véritable outil de promotion nationale. 

Plusieurs facteurs ont agi sur le développement du français acadien. En premier lieu, l’éclatement de la communauté acadienne par le biais de la Déportation (le Grand Dérangement), l’isolement géographique qui s’en suivit, l’absence de droits linguistiques pendant plus d’un siècle et, bien sûr, le voisinage d’une forte majorité anglophone, souvent hostile et peu ouverte au fait français.

La langue parlée par les Acadiens – le français acadien – est distinct du français standard et du français québécois. Le français acadien est original dans la mesure où il s’est enrichi des contacts avec les anglophones et les Amérindiens, en plus des mots hérités de la France du centre-ouest du XVIIe siècle.

Après le Grand Dérangement, les Acadiens ont formé des enclaves ça et là sur le territoire des provinces Atlantique. C’est grâce à la formation de ces îlots francophones que la majorité des Acadiens a échappé à l’anglicisation. Toutefois, la distance séparant ces enclaves et leur situation minoritaire par rapport aux anglophones ont créé des différences au niveau du parler acadien. C’est en parcourant les régions francophones des provinces de l’Atlantique que l’on peut constater ces variantes régionales.

Les variantes linguistiques en Acadie ne correspondent pas aux frontières interprovinciales, ni aux limites communautaires. Comme dans toute culture, le français acadien peut varier selon les individus, les générations et les groupes socioéconomiques.

Pour sa part,  le français acadien du Nouveau-Brunswick est riche de plusieurs parlers régionaux. Dans le nord-ouest et nord-est de la province, vu la proximité géographique du Québec, il y a une nette influence québécoise sur la langue. L’usage de mots anglais est plutôt rare. La réalité des Acadiens du sud-est de la province est cependant tout autre. Selon la linguiste acadienne, Louise Péronnet, leur parler  est le plus représentatif du français acadien. On y trouve deux parlers distincts : le premier est traditionnel, et le second, le chiac est le parler de la nouvelle génération acadienne. Langue urbaine le chiac se caractérise par le mélange du français, de l’anglais et du vieux français. Plus que partout ailleurs en Acadie, l’alternance et l’emprunt à l’anglais sont fréquents, pour ne pas dire naturels dans les communautés acadiennes du sud-est du Nouveau-Brunswick.

Réf. : 
  • L’Acadie de l’Atlantique – Maurice Basque, Nicole Barriau et Stéphane Côté. En collaboration avec Raymond Cyr et Emmanuel Doucet Editeur : SNA – CEA – CIDEF-AFI
  • Statistique Canada – Série : Perspectives géographiques – Recensement 2011