L'Acadie d'aujourd'hui

Aujourd’hui, comme l’a écrit Yves Cormier dans son Guide des Provinces Maritimes Francophones, l’Acadie se doit de “trouver une nouvelle identité qui respecterait son riche héritage européen et amérindien, tout en véhiculant une ouverture propre aux sociétés contemporaines occidentales”. Bien plus qu’un territoire aux repères géographiques délimités, l'Acadie, fière de son héritage, se veut synonyme d'un peuple résilient et déterminé, d’une société de langue française moderne, autonome, pluraliste et diversifiée. En témoigne le livre L'Acadie, hier et aujourd'hui - l'histoire d'un peuple (Éd. la Grande Marée) qui a obtenu le prix littéraire France-Acadie en 2015.

Co-dirigé par Phil Comeau, Warren Perrin et Mary Broussard Perrin, cet ouvrage – rassemblant une collection de 65 articles pluridisciplinaires de 55 auteurs – retrace la réalité du peuple acadien, tant en Amérique du Nord qu'en Europe et en Louisiane.

Le CMA


• En 1988, s’appuyant sur un concept d’André Boudreau, Jean-Marie Nadeau lance l'idée d'un rassemblement de tous les Acadiens du monde. Peu à peu le projet d’un Congrès mondial acadien prend forme et se définit ainsi : “Développer des liens plus étroits entre les Acadiens et les Acadiennes de partout dans le monde”. 
Organisé tous les cinq ans depuis 1994, le Congrès mondial acadien (CMA) a donc pour objectif de réunir durant une dizaine de jours la diaspora acadienne répartie aux quatre coins du monde dans des retrouvailles, rassemblements familiaux, conférences et spectacles. Depuis 2004, la pérennité du Congrès mondial acadien est assurée par la Société Nationale de l’Acadie (SNA) qui recueille les candidatures de régions souhaitant devenir hôtesse de l'événement, et en fait l'évaluation par l'entremise d'un comité d'évaluation (COCMA).

• En 2014, le 5e Congrès mondial acadien (8–24 août) s’était donné comme slogan : “L’Acadie du monde… Une nouvelle Acadie”. Selon le CMA, cette nouvelle Acadie inclut, englobe, rassemble, embrasse, elle est cosmopolite, elle est internationale, c’est l’Acadie populaire, l’Acadie dont on parle dans la rue, l’Acadie dans les familles, dans les communautés, dans les cafés, à la patinoire comme à la plage…
Ce cinquième congrès s'est déroulé dans l'Acadie des terres et forêts, soit le nord-ouest du Nouveau-Brunswick (comtés de Madawaska, Victoria, Restigouche), le comté d'Aroostook dans le Maine, et le comté de Témiscouata au Québec. L'ouverture du Congrès a eu lieu à la borne frontalière entre les provinces du Nouveau-Brunswick et du Québec et de l'état du Maine sur la rive du Beau lac tandis que le méga-spectacle du 15 août s'est déroulé à Madawaska, dans le Maine (Etats-Unis). 
En outre, pour reconnaître et faire honneur à la contribution des Autochtones, fondamentale à la survie des Acadiens, les organisateurs du CMA 2014, s’étaient donné comme objectif de s’assurer que les Autochtones participent à l’événement et soient bien représentés dans toute la programmation en travaillant en étroite collaboration avec des représentants des Malécites et Mi’kmaq du territoire de l'Acadie des terres et forêts. 
Selon un rapport de la SNA, “plus de 200 000 personnes ont pris part aux différentes activités du CMA 2014, soit 61 500 personnes différentes, en incluant notamment 19 000 personnes aux rencontres des familles. Le nombre de touristes dans les régions lors de l'événement est évalué à 21 000 alors que 40 500 résidents locaux ont pris part à au moins une activité entre le 8 et le 24 août. Cette affluence a généré 28,3 millions de dollars, ce qui représente l'équivalent d'un peu plus de 345 emplois en années-personnes.”

• En 2019, le sixième congrès est programmé en août et se déroulera dans le Sud-est du Nouveau-Brunswick et à l'Île-du-Prince-Édouard. 


CMA 1999 - Louisiane

CMA 2004 - Nouvelle écosse

CMA 2014 - Nouveau Brunswick,
Quebec et Maine

La Francophonie

• En 1999, le Canada, le Nouveau-Brunswick et l'Acadie accueillaient les chefs d'État et de gouvernement ayant en commun l'usage du français à l'occasion du VIIIe Sommet de la Francophonie, qui se déroula du 3 au 5 septembre à Moncton. Le Sommet, présidé par Jean Chrétien, a réuni les 52 chefs d'État et de gouvernement des pays membres de la francophonie. 
Fernand Landry, directeur général de l’organisation du Sommet, avait confié à nos journalistes : “En tant qu’Acadien, cette participation était importante car mon peuple fait partie de la grande famille francophone. En 1968, c’était avec la mission des “quatre Acadiens” en France, la première implication de l’Acadie moderne avec la Francophonie. Trente ans plus tard, nous allons recevoir tous les chefs d’Etat. C’est vraiment extraordinaire pour les Acadiens de voir cette évolution en une aussi courte période.” (cf. revue Les Amitiés Acadiennes n° 87, 1er trimestre 1999)
• En 1999 encore, la première édition des Jeux de la francophonie canadienne se tient à Memramcook, au Nouveau-Brunswick. Ces jeux ont lieu tous les trois ans et sont ouverts aux francophones du Canada âgés entre 15 et 18 ans.
• En 2002, la ville de Moncton (N.-B.) devient la première ville importante au Canada à se proclamer officiellement bilingue, statut que le conseil municipal réitère en 2012, même si l’affichage bilingue n’est pas partout présent. 

Jacques Chirac - 8e Sommet de la Francophonie à Moncton -1999
Affichage en français 
à l’Ile-du-Prince-Edouard
Place de l'Acadie à Paris


La Diaspora

Alors que le Québec est devenu l'une des dix provinces de la Fédération canadienne, le territoire acadien n’a jamais été reconnu officiellement, il ne constitue pas la base d'un Etat, d'une province ou d'une région administrative. C’est pourquoi certains Acadiens se définissent comme “un peuple dans un pays sans frontière”.
Le géographe acadien Adrien Bérubé parle d’une Acadie opérationnelle, celle des régions des provinces Maritimes où vivent la majorité des Acadiens, et d’une Acadie généalogique, constituée des régions qui ont accueilli les familles acadiennes au moment de la Déportation. Cette Acadie généalogique, ou Acadie de la diaspora, est composée de plusieurs régions du Québec, de la Nouvelle-Angleterre, de la Louisiane et du centre-ouest de la France. 

• Au Québec, l’Association acadienne de la région de Québec regroupe les descendants des Acadiens qui se sont réfugiés au Québec pour fuir la déportation ou qui, plus tard, y ont émigré pour trouver du travail.

• En Nouvelle-Angleterre, c’est l’emplacement de la frontière entre le Canada et les Etats-Unis qui a séparé la région du Madawaska en deux parties, l’une américaine, l’autre canadienne et c’est ainsi que des familles acadiennes se sont retrouvés séparées. Le Congrès mondial acadien de 2014, qui s’est déroulé pour partie dans le Maine, a bien montré la force de résilience des Acadiens et leur attachement à leur culture. 

• En Louisiane, parmi les manifestations rassemblant la diaspora acadienne, citons le 2e Congrès Mondial Acadien qui a eu lieu en août 1999 dans plusieurs régions “Acadiana” de la Louisiane : Houma-Terrebonne, Lafayette, Baton-Rouge… Notre association Amitiés France-Acadie y était représentée par sa vice-présidente et son mari. Tous deux ont partagé leur temps entre les rencontres officielles et la tenue d’un stand expliquant les buts de notre association en France.

• En France, plusieurs associations régionales rassemblent les descendants des Acadiens rapatriés en France au moment du Grand Dérangement : Belle-Île-Acadie, Les Cousins acadiens du Poitou, Bretagne-Acadie-Louisiane, Châtellerault-Québec-Acadie, La Maison de l’Acadie, Falaise-Acadie-Québec et Acanami, tandis que l’association normande, La Semaine acadienne, s’est donnée pour mission de faire rayonner la culture acadienne.

• En Acadie, dans le cadre de la Commémoration du 250e anniversaire du Grand Dérangement, la Société Nationale de l’Acadie (SNA) a initié un projet visant trois objectifs : la commémoration du Grand Dérangement, la sensibilisation à l'histoire et à la culture acadienne, la promotion de l'Acadie contemporaine. Ce projet a pris la forme de monuments visant la période du Grand Dérangement rendant hommage à l'Odyssée du peuple acadien. Outre en Acadie, plusieurs de ces monuments ont déjà été érigés au Québec, en Louisiane, à Terre-Neuve et Labrador, à St-Pierre et Miquelon (France)… 



Par Jean-Marie Fonteneau 

Monument commémorant
le Grand Dérangement 
Les lieux de la diaspora 


Des personnalités acadiennes

Au cours de leur Histoire, de nombreux Acadiens se sont illustrés dans différents domaines… Citons quelques personnalités marquantes qui œuvrent ou ont œuvré dans le domaine politique :

– Pascal Poirier (1852-1933), écrivain  (L’origine des Acadiens, Le Glossaire acadien…), avocat et premier Acadien à devenir sénateur le 9 mars1885 et le restera jusqu’à sa mort. Membre de la Société royale du Canada en 1899, il est fait Chevalier de la Légion d’Honneur française en 1902.

– Pierre Elliott Trudeau (1919-2000), Premier ministre du Canada (1968-1979 et 1980-1984). Il abolit la peine de mort. Il établit des relations avec la Chine communiste (1970) puis avec Cuba (1976). Il est l’acteur principal du Rapatriement de la Constitution du Canada  : le Canada est reconnu apte à modifier lui-même sa Constitution, sans l’accord du Royaume-Uni. 

– Gilbert Finn (1920-2015), ancien lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick (1987-1994), il fut aussi PDG de la société d’assurance Assomption Vie, recteur de l’Université de Moncton (1981-85). Il fit partie de la délégation des 4 acadiens qui rencontrèrent le général de Gaulle à Paris en 1968 (avec Abélard Savoie, Euclide Daigle, Léon Richard).

– Louis J. Robichaud (1925-2005), premier Acadien à accéder au poste de Premier ministre du Nouveau-Brunswick (1960-1970). On lui doit le programme “Chances égales pour tous”. Il a contribué à la fondation de l’Université de Moncton et a fait adopter la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick, qui érigea le français au rang de langue officielle. 

– Romeo LeBlanc (1927-2009), politicien et journaliste à Radio-Canada, il fut le premier Acadien à être nommé Gouverneur général du Canada (1995-99), exerçant ainsi les plus hautes fonctions au pays. Il démissionne en 1999 pour des raisons de santé. Après sa mort, un timbre lui est dédié par Post-Canada, et, en 2016, l’aéroport de Moncton prend le nom “Aéroport international Roméo-LeBlanc du Grand Moncton”. “C'est probablement la décision la plus facile que j'ai eu à prendre en tant que ministre des Transports, a déclaré le ministre Garneau, ajoutant : c’était franchement unanime, l'appui venant de partout ici dans la région pour signaler que Roméo LeBlanc a été un grand Canadien, un grand Acadien.”

– Viola Léger (1930-), ancienne sénatrice (2001-2005) et actrice célèbre pour son interprétation du personnage de La Sagouine. Elle a reçu l’Ordre du Canada et est Chevalier de l’ordre français des Arts et des Lettres…

– Robert Pichette (1936-), homme politique (chef de cabinet, puis sous-ministre de  Louis J. Robichaud, le Premier ministre du Nouveau-Brunswick), écrivain et journaliste, il est l’innovateur du drapeau actuel du Nouveau-Brunswick (1965). Autorité reconnue en héraldique, de nombreuses fois décoré par le Canada et la France, il est docteur ès lettres honoris causa de l'Université Sainte-Anne (NE) et docteur honoris causa en administration publique de l'Université de Moncton (NB). 

– Bernard Lord (1965-), homme politique acadien, il accèda à la tête du gouvernement néo-brunswickois (1997-2006). Pour son élection, il fit “20 promesses qu'il accomplirait dans les 200 premiers jours de son mandat s'il était élu”. Elu, il réussit à accomplir chacune de ses 20 promesses !

– Justin Trudeau (1971-), fils de Pierre Elliott Trudeau. Enseignant de profession, il “entre en politique” en 2007 comme candidat du Parti libéral… C’est l’actuel Premier ministre du Canada (2015-).  

– Jean-Guy Rioux (1940-2017), militant acadien actif au sein de la communauté acadienne du Nouveau-Brunswick, mais aussi sur la scène nationale et internationale. Il a participé à la création du campus de l’Université de Moncton à Shippagan (NB). Il devient président de la Société des Acadiens et Acadiennes du Nouveau-Brunswick en 2000 et président du Congrès mondial acadien de 2009. 

– Jean-Marie Nadeau (1948-), journaliste et syndicaliste acadien, il est reconnu comme étant à l’origine des l’idée du Congrès mondial acadien. Il a été secrétaire général de la Société Nationale de l’Acadie (SNA) de 1984 à 1989, directeur de la rédaction de L’Acadie Nouvelle (1989-1990)…, lauréat du prix France-Acadie en 1993 pour Que le tintamarre commence !, il est membre de l’Ordre des francophones d’Amérique et membre de l’Ordre national du Mérite (France, 2004).


– Madeleine Delaney LeBlanc, présidente fondatrice du Conseil consultatif sur la condition de la femme du Nouveau-Brunswick, présidente et directrice générale de la Commission de la santé et sécurité au travail du Nouveau-Brunswick. Puis sous-ministre des Affaires intergouvernementales et autochtones du Nouveau-Brunswick. Actuellement à la retraite, elle a été admise à l’Ordre du Canada en 2016 pour le rôle qu'elle a joué dans l'avancement de la justice sociale, particulièrement en ce qui concerne les droits des femmes.